Pédagogie
L'Education Nouvelle
"L'éducation nouvelle prépare, chez l'enfant non seulement le futur citoyen capable de remplir ses devoirs envers ses proches et l'humanité dans son ensemble, mais aussi l'être humain conscient de sa dignité d'homme".
(Principe de la Ligue Internationale d’Education Nouvelle – 1921)
J'appelle « Education Nouvelle » un mouvement pédagogique contemporain qui n'est nouveau que parce qu'il s'adapte aux besoins nouveaux de la société d'aujourd'hui. Il n'est point théorique mais pratique. Il s'est affirmé tant en Europe qu'en Amérique par la création de cent écoles nouvelles qui, toutes, rompent avec une routine séculaire et tendent à rendre l'instruction et l'éducation à la fois plus psychologique et plus sociale. (Adolphe Ferrière)
Historique
Au sortir de la Première Guerre mondiale, des savants et des éducateurs ressentent l'urgence de lutter contre l'acceptation fataliste par les hommes, de la guerre comme solution.
Cette volonté de paix, doit entrainer avec soi l'Education nationale et internationale des petits français dans un nouveau sillon de manière à préparer, non pas seulement une patrie forte, mais une nation prête à l'interaction mondiale…
Nous attendions avec impatience le grand projet de réformes, écrit Georges Bertier.
A notre grande surprise, le ministre n'envisage aucun des problèmes que la lumière tragique de la guerre semblait mettre particulièrement en valeur.
Il porte uniquement sur l'instruction d'une classe, la bourgeoisie, et laisse de côté tout le reste du pays et les trois-quarts de l'éducation.
La Ligue Internationale pour l'Education Nouvelle est créée au congrès de Calais le 6 août 1921, à l'instigation de la New Education Fellowship anglaise, représentée par Béatrice Ensor et son président Baillie-Weawer et par le Bureau international des Ecoles nouvelles, représenté par son directeur Adolphe Ferrière.
Il existe, il est vrai, des associations qui travaillent dans le domaine administratif de l'école… Mais il n'existe aucune association internationale qui relie entre eux ceux qui trouvent les mesures administratives nécessaires, mais insuffisantes, et qui veulent un changement radical du point de départ et du but de l'éducation.
La Ligue internationale pour l’Education nouvelle affiche sa volonté de rompre définitivement avec un modèle d’éducation traditionnelle qui condamne les écoliers à la docilité et à l’immobilisme.
Des personnalités, parmi les plus connus pour leur dévouement à la cause de la rénovation pédagogique ont accepté de lui prêter leur appui moral : Georges Bertier, président des éclaireurs de France, Jean Brunhes, professeur au Collège de France, Ferdinand Buisson, Roger Coussinet, inspecteur de l'enseignement primaire, Alice Jouenne, directrice de la première Ecole de plein air de Paris…
Le nom choisi par la nouvelle Ligue est volontairement général et imprécis. Il ne s'agit pas de faire campagne pour une doctrine d'éducation, pour une pratique scolaire ; il s'agit surtout d'entretenir et de susciter le désir du mieux, l'esprit de recherche, l'ambition de la profondeur et de l'efficacité toujours accrues, qui est œuvre de vie, son vrai sens et sa valeur réelle.
Trois revues sont créées pour lui servir d'organes ; celle pour les pays de langue latine, en français, Pour l'Ere Nouvelle est dirigée par Adolphe Ferrière.
Tout abonné à l'une des revues est fait membre de la L.I.E.N. et est considéré comme adhérent à ses principes directeurs.
Une association La Nouvelle éducation, est créée par Madeleine Guéritte et Roger Cousinet, en janvier 1921.
L'association a pour objet de réunir tous les éducateurs décidés à favoriser en France l'activité personnelle des enfants, soit à l'école soit dans la famille. Son but est d'aider ces éducateurs, de faire connaître et de répéter leurs expériences afin que les travaux de chacun puissent profiter à tous, et que se fasse plus vite la transformation nécessaire de nos méthodes d'éducation.
A Paris, une section française de la L.I.E.N est fondée avec pour seule représentante, une secrétaire, Jeanne Hauser.
Dans le même temps, Alice Jouenne, directrice d’école de plein air, fonde L’Education nouvelle, groupe d’études, de recherches et d’expériences éducatives, représenté par un comité d’honneur prestigieux au sein duquel siègent, entre autres, le député Ferdinand Buisson, l’écrivain Georges Duhamel, l’académicien Anatole France, Léon Frapié,..
Les deux organisations se réunissent et adoptent une charte commune dès le 15 février 1922.
La présidence est tenue par Paul Fauconnet, professeur à la Sorbonne, jusqu'en 1931, date à laquelle le groupe appelle successivement à la présidence, pendant une période de deux ans, l'un ou l'autre des vice-présidents.
Faute de moyens, les premières initiatives de la section française de la L.I.E.N se révèlent fort modestes. La situation est préoccupante lorsque se rassemble du 22 au 27 avril 1924, au château de Villebon, la cinquantaine d’éducateurs tout au plus qui représente ce mouvement d’éducation en France.
Les préjugés sont contre nous ; dit Alice Jouenne qui préside la première séance ; l’administration et la routine sont contre nous. Beaucoup de parents aussi. On nous objecte qu’avec nous les enfants jouent au lieu de travailler. Il y a six mille ans que l’axiome biblique a présenté le travail comme un châtiment. Il serait temps de tourner la page ! Trop d’éducateurs se font une conception périmée de l’ordre et du travail. Fraternité et joie, telles doivent être les bases nouvelles de l'école.
Adolphe Ferrière qui préside ce congrès, interroge ensuite les éducateurs présents :
1er Comment pouvons-nous changer le cadre de l'école pour adapter celle-ci aux besoins de l'enfance ?
2e Comme éducateurs à qui ce cadre est aujourd'hui imposé par la loi et par la société, comment tirerons-nous parti des circonstances pour faire en sorte que nos élèves aient le moins possible à pâtir du régime scolaire actuel ?
Alice Jouenne conclut le congrès en souhaitant que l'éducation nouvelle ne soit pas un objet de délibérations vain. Qu'il faut la faire entrer dans la réalité, qu'il faut faire connaître et répandre la revue Pour l'Ere nouvelle.
Le groupe français se charge, à partir de 1925, de l'administration de la revue Pour l’Ere nouvelle.
Le groupe mène une active propagande pour toucher l'enseignement public, où il trouve un écho parmi les maîtres qui utilisent les coopératives scolaires inspirées de Profit, ou le travail par groupes dont Cousinet établit la théorie et encourage la pratique.
Pour accélérer la diffusion des idées de l'Ecole nouvelle, Adolphe Ferrière décide d’augmenter la parution de Pour l’Ere nouvelle qui devient mensuel en janvier 1927, et limite la place qu’elle réserve jusqu’à présent aux articles théoriques. De plus, Adolphe Ferrière s’adjoint les services d’un instituteur, Eugène Delaunay qui, à travers sa chronique, livre un point de vue sur la vie politique et syndicale française dans ses rapports avec l’éducation.
De son côté, la L.I.E.N connaît des succès d’audiences lors de ses congrès mais comptent peu de représentants de la section française.
Au printemps 1927, Paul Fauchet qui veut prendre ses distances avec l'association La Nouvelle Education projette de créer en France, une nouvelle structure fédérative ayant pour vocation d'être la correspondante du Bureau International d'Education, avec l'approbation de Pierre Bovet et d'Adolphe Ferrière. Les relations entre Madeleine Guéritte et le Bureau International d'Education (B.I.E.) sont assez dégradées. Madeleine Gueritte refuse de fusionner sa revue avec celle de Ferrière en argumentant son manque de critique qui met du bon, du médiocre et du très mauvais pêle-mêle. Paul Fauchet envoie le 30 mai 1927, au nom du Comité d'organisation de l'Office central d'Education, le schéma d'un programme.
Madeleine Gueritte lui écrit que le travail le plus urgent n'est pas un travail de fédération, c'est un travail de filtrage, pour séparer ceux qui font de la besogne réelle de ceux qui ne font que du sabotage.
Le Bureau français d'éducation est créé le 23 septembre 1927 après être agréé par le Bureau International d'Education lors du congrès de Locarno organisé par le L.I.E.N.
Par la suite, Madeleine Guéritte n’aura de cesse de dénigrer le travail de Paul Faucher.
En novembre 1927, Julien Crémieu, administrateur de la revue Pour l’Ère Nouvelle, désireux de créer une section française de la L.I.E.N., entre à son tour en conflit avec Paul Faucher.
L'année 1929 apporte quelques changements. La section française de la L.I.E.N. devient officiellement, le Groupe Français d'Education Nouvelle.
Il est procédé à quelques modifications statuaires. La présidence est toujours assurée par Paul Fauconnet et la vice présidence, conjointement par Henri Piéron et Henri Wallon. Paul Langevin accepte la présidence d'honneur du groupe. On adjoint comme secrétaire Emilie Flayol, ancienne directrice de l'Ecole Normale de la Rochelle, on nomme Jeanne Hauser, trésorière et Madeleine Bardot, inspectrice, secrétaire-adjointe.
Le Groupe s'installe dans les locaux du Musée pédagogique, rue Gay-Lussac.
Appelant de ses vœux les parents et les éducateurs à se joindre à lui, le G.F.E.N plaide pour le rapprochement et la collaboration de toutes celles et de tous ceux qui souhaitent travailler en dehors des doctrines et des dogmes pédagogiques.
En 1929, au 5ème congrès mondial d’Education nouvelle, à Elseneur (Danemark), s’expriment, autant de psychologues que de pédagogues, et presque autant de psychologie que de pédagogie.
Le postulat de départ sur la nature de l’enfant faite d’énergies créatrices n’est pas remis en question : l’enfant demeure un potentiel à développer. Cependant, sous l’influence des psychologies nouvelles, la Ligue internationale pour l’éducation nouvelle évolue vers une conception mitigée de cette nature. Si le développement de l’individu reste le but de l’éducation, il ne peut plus se réaliser sans l’action du milieu. L’école est aussi une œuvre et l’idée d’un développement de l’enfant uniquement spontané et naturel ne suffit pas. Dès lors, développement naturel et développement social ne s’opposent plus, mais se complètent.
(Annick Raymond)
Dans un article sur le 5ème congrès à Elseneur, Jacques-Olivier Grandjouan s'interroge sur les fondements du mouvement :
Jusqu’ici les innovateurs créaient, transformaient, refondaient, sans trop se préoccuper de principes. Ils obéissaient à la nécessité du moment (…). Les systèmes philosophiques venaient ensuite – quand ils venaient – et n’étaient pas forcément très scientifiques, ni très cohérents en toutes leurs parties, ni même d’un bout à l’autre d’accord avec la pratique de leurs auteurs. (…). Comme on pouvait s’y attendre, ces systèmes philosophiques – issus d’une pratique pédagogique qu’ils prétendent régir – forment un vaste ramassis hétéroclite de théories contradictoires, rattachées à des doctrines philosophiques de tout âge et de toute nuance. Aujourd’hui qu’on prend au sérieux l’éducation nouvelle, qu’on fait appel à elle, qu’on lui demande des principes d’action, quelle doctrine générale peut-elle offrir, pour faire la liaison entre ces doctrines multiformes, et au besoin pour les dominer ? Peut-on se contenter des « Principes de Ralliement » de The New Education Fellowship, ou de sa Charte des Ecoles Nouvelles, principes à la fois vagues pour un critique impartial et trop affirmatifs pour certains ?
A terme, si cette capacité à composer avec tant de doctrines et à faire coopérer tant d’opinions différentes, est l’une des forces de la L.I.E.N, elle n’en constitue pas moins également l’une de ses principales faiblesses. En effet, il est attendu de ce mouvement qu’il soit en mesure de justifier de ses assises doctrinales faute de quoi il devient suspect voire dangereux aux yeux de ceux qui ne peuvent adhérer à un tel éclectisme idéologique. (Laurent Gutierrez)
En janvier 1932, la revue Pour l'Ere Nouvelle, passe aux mains du groupe français, à charge pour lui de conserver à cet organe son caractère international latin et sa liaison avec la L.I.E.N. Un comité de rédaction est formé par deux personnalités françaises : le Dr Piéron et le Dr Wallon ; une suisse, Jean Piaget ; une belge, Ovide Decroly. Emilie Flayol est désignée comme secrétaire de la rédaction.
Le G.F.E.N. organise, en 1932, le congrès de Nice de la L.I.E.N.
C’est une date importante, à mon avis, que celle où la Ligue internationale pour l’éducation nouvelle a mis à son ordre du jour les rapports de l’individu avec son milieu. C’est une date importante d’abord parce que cette question répond aux préoccupations les plus pressantes de l’heure actuelle ; c’est une date importante aussi scientifiquement, parce qu’elle réintègre dans l’attitude de l’enfant et dans l’éducation quelque chose qu’elle avait un peu trop oublié. (Henri Wallon)
La L.I.E.N adopte, non sans quelques difficultés, une nouvelle charte.
Paul Langevin, président d’honneur du G.F.E.N, et surtout Henri Wallon qui loue avec insistance le modèle communiste de la société, politise le débat empreint traditionnellement d’une certaine neutralité. L’insistance avec laquelle ils prônent une éducation qui doit résolument s’orienter vers la recherche d’une hiérarchie de valeurs dont la reconnaissance assurerait le règne de la justice et de la paix, va avoir des répercussions sur les principes jusque là fédérateurs de la L.I.E.N. (Laurent Gutierrez)
Le congrès a un grand retentissement. Il révèle à beaucoup l'existence et la possibilité des méthodes rénovées, et aussi l'étendue et l'université du problème de l'éducation. Sa préparation est d'ailleurs l'occasion et le moyen d'un intense effort de propagande dans les diverses régions de France. Elle aboutit parfois à la création de groupes départementaux. Quelques journaux de la grande presse accueillent des articles sur l'éducation nouvelle. Le congrès offre à tous les pionniers de l'éducation nouvelle l'occasion et les moyens d'assurer une grande publicité aux efforts qu'ils entreprennent et aux résultats qu'ils obtiennent. Une salle, entre autre, réunit les documents et renseignements qu'exposent toutes les sociétés et associations qui, sous une forme ou un aspect quelconque, travaillent à perfectionner l'éducation : la Nouvelle Education, le Groupe du Nord des Amis de l'Ecole Nouvelle, l'Imprimerie à l'école, la Correspondance Internationale, les Coopératives scolaires, l'Hygiène par l'Exemple, la Ligue de l'Enseignement, etc.
À partir du congrès de Nice, notamment sous l’influence de la psychologie sociale, il apparaît illusoire de vouloir cerner l’enfant dans son individualité, on ne peut plus compter sans le milieu dans lequel il évolue.
La science pédagogique s’épuise à tenter de cerner la nature individuelle de l’enfant, l’enfant est avant tout un être social. C’est la conviction première de Wallon.
Sans conteste, ce congrès de Nice marque un tournant dans l’histoire de la L.I.E.N, en général, et de celle du G.F.E.N, en particulier, avec l’affirmation d’une doctrine, désormais, assumée par ses dirigeants français, tout au moins. C’est également à partir de cette manifestation, que le G.F.E.N va nouer des liens plus étroits avec les pouvoirs publics.
Basé au Musée pédagogique et dirigé majoritairement par des membres ou anciens personnels de la haute hiérarchie de l’enseignement public, le G.F.E.N va progressivement apparaître comme une force de proposition alternative aux réformes de l’enseignement. Ces accointances avec le ministère de l’Education nationale vont, dès lors, assurer une certaine assise à l’action du G.F.E.N qui, fort de ce soutien, va entreprendre une véritable campagne de propagande. (Laurent Gutierrez)
Sixième congrès mondial de la Ligue Internationale pour l'Education Nouvelle :
- Lettre adressée à Melle Léontine Férignac à Objat (Corrèze)
- Carte du Groupe Français d'Education Nouvelle
- Carte de congressiste
L'action du G.F.E.N. prend plus d'ampleur et de précision.
Une conséquence presque immédiate est le projet de fusion du Bureau Français d'Education et du G.F.E.N. Henri Wallon remplace ainsi, dès 1933, Paul Fauconnet à la présidence du Groupe. L'assemblée générale de 1934 ratifie les accords de son bureau. Les membres et les noms des deux sociétés sont confondus et le président du B.F.E. Paul Faucher est élu vice-président aux côtés de Georges Bertier, Paul Fauconnet et Henri Piéron ; Marguerite Reynier-Paget, Mme Grandjouan, et Mr Baucomont sont nommés membres du Comité d'action.
En dehors de l'action sur l'opinion, le G.F.E.N. agit directement sur les pouvoirs publics, en les incitant à prendre l'initiative d'une action réformatrice. Il veut obtenir du ministère qu'il consente à permettre ou à encourager, en tous cas à contrôler, des expériences limitées.
La mort du Dr Decroly, le 12 septembre 1932, est très regrettée par les amis de l'Education Nouvelle.
(Voir page Decroly)
Le bureau du G.F.E.N. s'installe dans le nouveau bâtiment du Musée pédagogique, rue d'Ulm.
La revue Pour l'Ere Nouvelle connaît des difficultés financières à la suite de la baisse de son nombre d'abonnés.
Les écoles privées grandissent et leur exemple intéresse de plus en plus les membres de l'enseignement public.
Freinet quitte les cadres de l'enseignement officiel et fonde à Vence, un établissement d'éducation.
Les expériences de plus en plus nombreuses révèlent en se déroulant, les points de résistance (parmi le personnel, les administrateurs, les parents) et les insuffisances de préparation des maîtres.
Aussi l'action du G.F.E.N. est amenée à se modifier quelque peu. L'effort porte désormais sur la réduction de ces résistances et sur l'étude précise des problèmes qui se posent aux novateurs.
Freinet intervient, lors du Congrès international de Cheltenham en août 1936, pour rappeler l'ampleur de la besogne pédagogique qui devait être le domaine propre du Groupe Français : unir pour une action et des buts précis tous ceux qui, en France, sentent la nécessité d'une action pédagogique nouvelle.
Freinet invite les membres de son association d'être partout dans leurs départements, les meilleurs artisans de l'organisation nouvelle du groupe et d'adhérer tous, personnellement, au Groupe Français. Il leur demande également de constituer ensuite dans leur ville, dans leur arrondissement, dans leur département, des groupes d'éducation nouvelle, d'organiser des conférences afin de contribuer à la génération de notre école populaire et à la diffusion d'idées-forces. (Voir page Célestin Freinet)
La nécessité et même l'urgence de cette union des regroupements divers qui se consacrent aux progrès de l'éducation quels que soient les milieux où ils se développent, et les formes diverses des techniques qu'ils préconisent est ressenti vivement par les adhérents.
La dispersion des forces françaises de rénovation entre tant d'associations, leur est apparue clairement, comme une erreur de tactique qui affaiblit les moyens d'action de chacune, restreint son rayonnement, paralyse ses efforts.
Plusieurs réunions des divers groupements ont lieu dans le dernier trimestre 1936 sur les projets ministériels en vue d'une réforme de l'enseignement et notamment la réforme du certificat d'études et le programme de l'année de scolarité prolongée.
Un travail important est, en 1937, le résultat de cette collaboration : le projet de réforme du certificat d'études rédigé par Hulin. Il est communiqué au Ministère de l'Education nationale.
Le G.F.E.N. propose au Syndicat National qui doit également présenter un projet, de travailler à une rédaction commune en prenant comme base le projet Hulin.
Le Syndicat National n'envisage pas d'une collaboration sous cette forme, mais souligne qu'il tiendra compte du projet dans ses propositions.
Le G.F.E.N procède à une réorganisation de son règlement intérieur afin d’intensifier sa propagande. A cet effet, il publie un bulletin interne et crée sept sections avec à leur tête un rapporteur afin d’interroger les choix du nouveau législateur en matière d’enseignement scolaire.
Ovide Decroly, Pierre Bovet, Beatrice Ensor, Édouard Claparède, Paul Geheeb et Adolphe Ferrière au congrès de Locarno en 1927 de la Ligue Internationale de l'Education Nouvelle.
Pour l’Ere nouvelle
Le genevois, Adolphe Ferrière, fondateur du Bureau international des écoles nouvelles en 1899, crée un périodique dont il est le rédacteur en chef, en langue française, pour diffuser les idées de la L.I.E.N., dès le mois de janvier 1922.
Ce que nous voulons transformer, ce n'est pas la technique de l'apprentissage de la vie ; celle-là a ses règles éprouvées, ses étapes précises, ses échelons "statiques" bien définis. Non : c'est l'esprit de l'école qu'il faut changer. C'est cet esprit qu'il faut orienter dans un sens diamétralement opposé. Il s'agit donc d'une transformation d'ordre "dynamique".
En quoi consiste-telle? Jusqu'ici nous avons élevé les enfants "du dehors au dedans". C'est nous, adulte, qui décidions de cette éducation en premier et en dernier ressort. Demain, c'est l'enfant qui, avec notre concours éclairé, s'élèvera "du dedans au dehors".
Non pas l'enfant "brut", mélange de caprices et de lubies, mais ce foyer rayonnant qui est en lui et que nous appelons l'esprit, foyer qui se concentre de plus en plus et qui rayonne de plus en plus : concentration de la pensée et de la volonté ; différenciation et enrichissement dans tous les domaines de la vie spirituelle, tant individuelle que sociale.
Est-il exagéré, dès lors, de parler d'une "Ere nouvelle" de l'éducation ?
Paul Faucher est le concepteur des Albums du Père Castor dont les premiers sortent en 1931. Il est le créateur en 1946 du Centre de Recherche biblio-pédagogique de l’Atelier du Père Castor, et en 1947 de l’Ecole du Père Castor.
Il entre en 1921 à Flammarion et prend en gérance la maison du Havre le 1er mai 1923. Son activité de libraire lui permet de rencontrer Madeleine Guéritte, originaire du Havre.
Il adhère à La Nouvelle éducation. Des échanges de courrier et une collaboration régulière commencent dès 1924 avec Madeleine Gueritte. Il fait connaître à sa clientèle le bulletion mensuel de La Nouvelle éducation et l'Oiseau bleu, la revue mensuelle de Roger Cousinet pour les enfants de 6 à 13 ans.
Il se lie d’amitié avec deux sociétaires. Marguerite Reynier, professeur au Lycée Montaigne et Jean Baucomont, instituteur à Garches, qui est le trésorier de La Nouvelle Éducation.
Il crée une bibliothèque circulante de pédagogie nouvelle.
Fin 1924, Flammarion l'appelle à Paris
Paul Faucher développe l’activité du groupe, en créant en octobre 1926 un Comité provisoire d’éditions pédagogiques, avec l’approbation de Flammarion. Il crée, chez Flammarion, une collection d’initiation à l’Éducation nouvelle, pour le grand public.
Adolphe Ferrière (1879-1960)
Adolphe Ferrière est un pédagogue suisse.
Une maladie le rend complètement sourd dès l'âge de 20 ans. Désireux de se consacrer en priorité à la pratique éducative, il doit renoncer à cette "vocation" à cause de son infirmité et, contre son gré, se faire "pédagogue".
A 20 ans il crée le Bureau international des écoles nouvelles. Vers la fin de 1902, il contribue à créer avec W. Frei et W. Zuberbühler, la première école nouvelle à la campagne de la Suisse.
Suite au premier congrès de la L.I.E.N. dont il participe à la création, en 1921, Adolphe Ferrière rédige les « Trente points qui font une école nouvelle » dans lesquels se reconnaissent les écoles nouvelles et qui les relient entre elles.
Sa revue "Pour l'Ere nouvelle" qu'il dirige depuis 1922, est une mine d'informations pour qui veut suivre les expériences éducatives d'avant-garde dans tous les pays du monde.
Ferrière serait, sous les dehors du modernisme, l'exemple même du psychopédagogue "spiritualiste", donc réactionnaire et borné.
Ferrière se sent plutôt proche du débat politique, économique et social européen, il y prend part effectivement très tôt. Il assume, de 1918 à 1923, la direction du journal chrétien-social l'Essor, et il continue, jusqu'à son retrait du débat public en 1953, son œuvre d'éditorialiste politique dont il faut souligner qu'elle est, par la quantité des publications, aussi importante que son œuvre pédagogique. S'intéresser à l'éducation, pour Ferrière, n'est qu'un volet de son action de libre citoyen.
Photo
Beatrice Ensor, Édouard Claparède, Paul Geheeb et Adolphe Ferrière au congrès de Locarno
Toutes les photos de cet article ont été prises du documentaire Révolution Ecole 1918-1939 de Joanna Grudzinska, produit par Estelle Fialon, sur Arté 2016 (les films du Poisson).
Maria Montessori au congrès de Locarno en 1927.
À la demande du Syndicat National des Instituteurs, Le G.F.E.N. participe au Congrès International de l'Enseignement Primaire et de l'Education populaire, tenu au palais de la Mutualité entre le 27 juillet et 3 août 1937. Emilie Flayol représente le groupement au comité d'organisation. Les principes et les techniques d'éducation nouvelle y sont présentés.
À l'occasion de la rencontre d'éducateurs d'Education Nouvelle le 1er août 1937, un heurt éclate entre la C.E.L. et le Groupe Français, du à une divergence de point de vue.
J'ai défendu, dit Freinet, la nécessité de faire, du Groupe Français d'Education Nouvelle, l'organisateur de toute l'action à mener en France sur le plan scolaire et social de l'éducation nouvelle.
J'ai eu — et je regrette d'y avoir été contraint – à lutter pour cela contre toute l'organisation actuelle du Groupe Français, trop exclusivement parisienne donc trop bureaucratique, qui sous-estime la valeur et les possibilités des nombreux camarades de province et qui n'a rien su faire jusqu'à ce jour pour les faire travailler…
Il est trop tard pour se lamenter sur l'apathie des éducateurs hors de notre groupe. Le dilemme est grave : ou bien le Groupe Français vit et travaille, même avec notre totale collaboration, ou bien il piétine et meurt, et nous ne saurions le suivre dans son suicide.
Dans Pour l'Ere Nouvelle le Groupe Français répond que loin d'avoir, comme le dit M. Freinet, manifesté de l'inquiétude au sujet de son activité pédagogique, Melle Flayol et M. Wallon l'en ont publiquement félicité. Mais comme il invoquait cette activité pour se faire réserver à lui et à ses amis de l'enseignement primaire les questions relatives à la pédagogie du premier degré, on lui a fait remarquer le morcellement qui en résulterait et qui est tout à fait contraire aux conceptions les plus modernes sur l'évolution de l'enfant et sur les besoins de son développement harmonieux, personnel et total…
Freinet répond que si nous voulons réorganiser le Groupe Français, ce n'est point pour nous en rendre les maîtres exclusifs. Nous essayons au contraire de susciter de nouvelles bonnes volontés qui, à côté de nous, en liaison avec nous, travailleront sur un plan légèrement différent au succès de l'éducation nouvelle…
Le Groupe profite de cette occasion pour rappeler son ferme propos de réunir, d'aider, de soutenir, tous ceux, individus et groupements, qui travaillent au perfectionnement ou à la propagande des méthodes d'éducation nouvelle, quelles que soient leurs convictions religieuses, politiques, philosophiques, etc. et par ailleurs leurs activités au sein d'autres groupements. Il ne prononce d'exclusive pour aucune méthode, pour aucune catégorie d'enfants, pour aucun milieu. Il demande à ses membres – dont chacun travaille dans son milieu, avec sa foi ou ses espoirs, avec ses techniques – d'accepter qu'à côté d'eux d'autres travaillent dans d'autres milieux, avec des croyances et des techniques différentes.
Freinet affirme continuer à apporter au Groupe Français sa collaboration totale, sans aucune manœuvre d'aucune sorte.
Le groupement prend un grand intérêt aux "expériences" que le ministre met en marche en vue d'une réforme profonde de l'Education nationale. Le choix des expériences sur l'orientation scolaire, la culture physique et les loisirs dirigés semble révéler l'intention nette de ne pas limiter la réforme à des questions de "structure" mais aussi de fonctionnement, c'est-à-dire de "méthodes".
A partir du 1er janvier 1939, les Editions Bourrelier se charge de la vente de Pour l'Ere Nouvelle.
Dans son numéro de juillet 1939, Ad. Ferrière pose la question : L'éducation Nouvelle traverse-t-elle une crise? A cette question John Dewey répond : oui. Il faut bien l'admettre, puisqu'on constate une levée de boucliers contre elle, dans bien des pays.
L'Education nouvelle est restée accrochée à mi-chemin. Née d'une réaction contre l'ancienne éducation traditionnelle autoritaire, elle a versé tout naturellement du côté d'un libertarisme excessif. Et pourtant, dès avant la guerre mondiale, les pionniers avaient mis en garde les novateurs contre cette erreur…
Sous prétexte d'épanouissement des virtualités individuelles, de nécessité pour cela de partir dedans – faits que méconnaissait l'Ecole traditionnelle -- on a crut devoir ne plus imposer de contrainte du dehors, "on tint en suspicion l'autorité du maître, celle du livre, celle du passé ; on renonça à organiser des programmes rigides, sous prétexte de respecter la spontanéité et la liberté des élèves, on laissa libre cours à leur fantaisie, à leurs impulsions. Quoi d'étonnant dès lors si, constatant le décousu et le caractère anarchique d'une telle éducation, de bons esprits, et d'autres plus soucieux de politique que d'éducation, demandent le retour à l'autorité !
Dewey, lui, prend la parole, non pas pour conseiller aux éducateurs aventureux de battre en retraite et d'adopter un "juste milieu", mais, au contraire, pour les prier d'aller plus avant dans la compréhension et analyse des principes et des conséquences de l'Education nouvelle.
Alexander Sutherland Neill (1883-1973)
A. S. Neill est psychanalyste et éducateur. Il œuvre durant 40 ans à l'éducation des jeunes.
En 1921, il fonde Summerhill, un établissement d'enseignement, afin d'y appliquer ses théories pédagogiques originales d'inspiration libertaire. Les principes du fonctionnement de l'école sont la liberté et une forme de démocratie basée sur l'égalité des voix pour sa gestion. Après avoir occupé plusieurs lieux, elle est située depuis 1927 dans le Suffolk près de Leiston en Angleterre.
L'école est fondée quelques mois après le premier congrès de la Ligue internationale pour l'éducation nouvelle à Calais, rassemblement de militants de l'éducation nouvelle auquel Neill participe activement. Il s'est ainsi dressé contre la pédagogie traditionnelle, qui selon lui est trop soucieuse d'instruire au lieu d'éduquer et qui n'a pour objet que de former de petits robots au service de l'industrie. Il décide d'accueillir dans son école des enfants « difficiles » et de leur appliquer une pédagogie révolutionnaire basée sur la liberté et le respect de chacun.
Le Comité d’action du G.F.E.N en 1930
Madeleine Bardot, Inspectrice des écoles maternelles ; M. Beltesse, Secrétaire général du Bureau International des professeurs de l’enseignement secondaire ; F.-L. Bertrand, Inspecteur primaire ; Mlle Carpentier, Inspectrice des écoles maternelles ; Anne-Marie Carroi, Professeur au lycée Fallières à Tunis ; Fernand Cattier, Directeur de l’Ecole Normale à Mirecourt (Vosges) ; M. Debray, Directeur de l’Institut départemental d’Asnières ; Emilie Flayol, Directrice d’Ecole normale en retraite ; Paul Fauconnet, Professeur à l’Université ; Jeanne Hauser ; Alice Jouenne, Directrice pédagogique de l’école de plein air de la ville de Paris ; Paul Langevin, Directeur de l’Ecole de Physique ; Georges Lapierre, Instituteur ; Henri Marty, Sous-Directeur de l’Ecole des Roches à Verneuil sur Avre ; Henri Piéron, Professeur au Collège de France ; Suzanne Roubakine, Fondatrice et directrice de l’Ecole nouvelle de Clamart ; Henri Wallon, Professeur à la Sorbonne ; Maurice Weber, Maître de conférences à l’Ecole de Sèvres, Directeur des « Compagnons de l’Université nouvelle » ; M. Zavitz, Directeur de l’Ecole du château de Bures.
Congrès de Locarno en 1927 de la Ligue Internationale de l'Education Nouvelle.
Au premier rang de chaises, de gauche à droite :
M. Ferrari, directeur de l'Ecole normale de Locarno ; Agnès Blank, professeur de la même école, secrétaire du congrès ; le Dr Ovide Decroly ; Adolphe Ferrière ; Pierre Bovet ; Beatrice Ensor (assis à terre devant elle : F.Bakulé) ; M. Rusca, maire de Locarno ; Paul Geheeb ; Hermann Tobler ; Otto Groeckel ; Wilhem Paulsen ; Viktor Fadrus ; Sigurd Nasgaard ; et enfin le Dr Édouard Claparède.
Tous capables, tous créateurs !
"Le GFEN (Groupe Français d'Education Nouvelle) défend, contre l’esprit de fatalité, l’idée que l’homme est responsable de son histoire ou qu’il peut le devenir. Son pari philosophique se fonde sur le fait que tous les hommes, les enfants des hommes, comme les peuples, ont des capacités immenses pour comprendre et créer, pour auto-socio-construire un savoir vivant et opératoire.
Le GFEN affirme que l’éducation, bien que liée au domaine économique et social, ne saurait être soumise à ses injonctions. Il interroge la notion de réussite scolaire actuelle faite la plupart du temps au prix d’une docilisation, d’une souffrance subjective et de la négation de l’autre. Il constate un déficit de démocratie dans les pratiques éducatives comme dans la société".
(Extrait du texte d'orientation du GFEN, Congrès de Paris, 10 au 12 juillet 2013)
Le Plan Langevin-Wallon, mûri dans la Résistance, élaboré sur des propositions du GFEN est porteur de l’élan démocratique de la Libération : il sera une base du travail du GFEN durant 20 ans malgré ses limites relatives aux notions d’aptitude et d’orientation.
Jean Piaget participe au Comité de Rédaction de la revue Pour l’Ere nouvelle et influence profondément la genèse de la démarche d’auto-socio-construction.
A la mort d'Henri Wallon en 1962, Gaston Mialaret qui lui succède à la présidence, réoriente le G.F.E.N. ; politiquement, en prenant ses distances avec le PCF et pédagogiquement, en prônant une ouverture aux expériences de terrain.
C'est ainsi que l'inspecteur Robert Gloton, lance en 1962 le projet de Groupe Expérimental de pédagogie active du XXème arrondissement de Paris -- regroupant trois écoles dont Vitruve – avec, pour objectif, la remise en question du rapport entre inégalité sociale et échec scolaire. Il réunit une première équipe au sein de l'école de Vitruve, constituée de jeunes instituteurs, syndiqués pour la plupart dans le courant Ecole Emancipée du SNI.
le 20è arrondissement, alors quartier au recrutement populaire où près de 60 % des élèves de CM2 ont redoublé de un à trois ans. Le challenge : éradiquer l'échec scolaire, permettre une scolarité sans redoublement, avec les mêmes exigences quant aux programmes.
L'expérience va concerner de 33 à 40 classes, avec des enseignants volontaires. Si aucune compétence technique particulière n'est requise, « trois qualités sont indispensables : l'optimisme pédagogique, le postulat que chez tout enfant les ressources personnelles sont considérables, qu'on ne doit jamais désespérer de celui qui a été jugé par d'autres irrécupérable et ne jamais le traiter comme tel ; un minimum d'imagination créatrice, chacun étant chaque jour poussé à inventer, sur la base des options générales ; l'esprit d'équipe (... ) », la mise en commun des problèmes et des solutions imaginées, sur le plan matériel comme pédagogique.
L'expérience dure 9 ans. Tous les élèves entrent en 6è sans redoubler, plus de 90 % réussissent le BEPC « à l'heure ». Les proviseurs de lycée reconnaissent que les élèves du groupe du 20ème - outre leur curiosité, leur goût d'apprendre et de comprendre - sont parmi les meilleurs en français et en mathématiques. Toutefois, certains professeurs trouvent que ces élèves, habitués à débattre, ont trop de franc-parler... Mais preuve est faite que l'échec scolaire n'est pas une fatalité.
En 1969, Robert Gloton devient Président du GFEN. Il apporte au Mouvement l’intégration des travaux d’Aurélien Fabre et son irremplaçable expérience de pédagogue « de terrain », lui permettant ainsi d’élaborer et de diffuser des pratiques nouvelles et des idées humanistes.
« La lutte contre l'échec scolaire » est le thème du Congrès de Toulouse du GFEN en 1971.
Les deux mouvements d’éducation nouvelle : le Groupe français d’éducation nouvelle et le Groupe d’étude pour les méthodes actives dans l’enseignement fusionnent en novembre 1971 à l’initiative du GEMAE.
1971-1975 Réalisation au Tchad d’un projet de transformation des pratiques d’enseignement.
Odette et Henri Bassis développent des pratiques nouvelles auprès des enfants, et une transformation des pratiques de formation des enseignants, apportant une rupture décisive dans la transmission des savoirs : non plus recevoir docilement, mais mettre en œuvre son intelligence et ses potentialités d'imagination créatrice pour " construire " son savoir, en faire un levier de transformation dans son rapport à soi, aux autres et au monde.
Le GFEN-GEMAE est agréé, en 1981, comme mouvement pédagogique de recherche et de formation par le ministère de l’Éducation.
1983 Première Université d’été à Montpellier.
La Nouvelle éducation, 10 rue de l'Elysée, Paris.
Association créée par Madeleine T. J. Guéritte et Roger Cousinet, en janvier 1921.
Le premier bulletin paraît en janvier 1922.
Les fondateurs de la Nouvelle Éducation considèrent la pédagogie comme une technique scientifique qui ne peut être constituée et développée que par l’observation et l’expérience. Cette technique est un ensemble de moyens propres, non à former l’enfant selon telle ou telle conception morale, philosophique ou sociale, mais à lui permettre de mettre mieux en œuvre les instincts et les aptitudes par lesquels il atteindra un développement harmonieux et complet. Il faut donc que ses instincts et ses aptitudes soient bien connus du pédagogue, et la psychologie de l’enfant est la base de toute pédagogie. Mais la connaissance de cette psychologie n’aura de valeur que si l’enfant est libre; on ne peut connaître ces instincts et ces aptitudes s’ils sont contrariés par l’éducation. [...] Ainsi le premier principe de la Nouvelle Éducation est le respect de l’enfant. (Cousinet et Guéritte, 1925)
Chaque mois (sauf août et septembre) La Nouvelle Éducation paraît avec une belle régularité. Cela est d’autant plus remarquable que les deux responsables, comme il est imprimé en tête de chaque numéro, habitent l’une (Mme Guéritte) à Surbiton en Angleterre, l’autre (M. Roger Cousinet) à Sedan (Ardennes). Le tarif d’abonnement renvoie au compte chèques postaux de M. Baucomont, le trésorier.
S’il n’y a pas d’autre adresse, c’est que La Nouvelle Éducation n’a ni siège social, ni secrétariat, ni personnel permanent ou semi-permanent. Quelques amis, quelques membres «sociétaires» se relaient pour assurer des liaisons, corriger des épreuves, copier des enveloppes, assumer des tâches diverses. Mais le gros du travail repose sur les deux responsables: ils se rencontrent de temps en temps à Paris et assurent, chacun de son côté un travail considérable. (Raillon)
Henri Wallon (1879-1962)
Henri Wallon est un psychologue, médecin, et homme politique français.
Depuis 1929, Henri Wallon est Professeur à la Sorbonne et en 1937, titulaire de la chaire de psychologie et d’Education de l’Enfance au Collège de France. En tant que psychologue, il contribue à une meilleure connaissance de l’enfant et met en évidence l’importance de l’affectif et de la motricité dans le développement psychologique et cognitif de l’enfant. La pensée de l’enfant se construit dans un va-et-vient entre l’action sur l’objet et la pensée des autres. En tant que praticien, il intervient dans différentes écoles : en 1938 il s’intéresse aux applications de la psychologie aux problèmes éducatifs avec les classes d’orientation du Projet Jean Zay.
Entre 1944 et 1947, il participe à la réforme de l’enseignement et la psychologie scolaire (Plan Langevin-Wallon).
Henri Wallon est Président du GFEN de 1946 à 1962.
Paul Langevin (1872-1946)
Physicien connu pour ses travaux sur le magnétisme, la détection par ultrasons et la théorie de la relativité, il montra en particulier, indépendamment d'Einstein et simultanément, qu'énergie et masse ne sont que deux formes d'une même réalité.
Il fut également un militant politique, pacifiste et antifasciste, et mit au point avec Henri Wallon, en 1945, un projet de réforme de l'enseignement, dite réforme "Langevin-Wallon". Le Plan du même nom est resté la bible des syndicats enseignants depuis une cinquantaine d'années.
Il a présidé en 1932 le congrès international de l'Education Nouvelle, collaboré à la création du Palais de la Découverte et à celle du G.F.E.N. Il existe depuis 1989 les Journées Langevin, mises en place pour la concertation des enseignants et chercheurs, des étudiants et du public sur l'apprentissage des sciences et la diffusion d'une culture "scientifique". Ces Journées se déroulent gratuitement à l'Université de Brest.
Jean Piaget (1896-1980)
Epistémologue, Jean Piaget, influencé au départ par Edouard Claparède, a formalisé un certain nombre de concepts-clés de l’apprentissage, tels ceux « d’assimilation » et « d’accommodation ». Entouré d’une équipe pluridisciplinaire, dans laquelle figuraient des psychologues, il a mis en évidence les stades qui jalonnent le développement de l’enfant (stades préopératoire, des opérations concrètes, des opérations formelles).
Entre autres mérites, son œuvre, considérable, présente celui de situer clairement les parts respectives de l’inné et de l’acquis : les « schèmes » préexistants ne deviennent opérants qu’à travers l’action et l’expérience. C’est en cela que Piaget, entre structuralisme et behaviorisme, s’inscrit dans le paradigme constructiviste.
Roger Cousinet (1881-1973)
Instituteur, puis inspecteur primaire, ce disciple d’Alfred Binet est, à la fin de sa carrière, chargé du cours de pédagogie à la Sorbonne. La thèse de doctorat entreprise sous la direction d’Émile Durkheim et interrompue par la Grande guerre, avait pour thème la sociologie enfantine. C’est donc tout naturellement qu’il mit en place plusieurs séries d’expériences sur le travail en groupes et la coopération au sein de la classe. Fondateur de l’association « La nouvelle éducation », il crée, avec François Châtelain, la revue «L’école nouvelle française».
L'Ecole Nouvelle Française, 1 rue Garancière, Paris.
Créée par Roger Cousinet et François Chatelain en 1945.
Président d'honneur : Adolphe Ferrière.
L'Ecole Nouvelle Française a pour but le progrès et l'extension d'une éducation nouvelle désintéressée, étrangère à toute autre préoccupation que celle de l'épanouissement physique, moral et spirituel de l'enfant.
Elle veut faire de l'école une vie ; de l'enfant un être discipliné dans la liberté ; de la classe une vraie communauté enfantine.
Décès de T. J. Guéritte le 29 juin 1948.